Le gouvernement a dévoilé un plan de hausses d'impôts. En effet, même si le house paper du gouvernement déclare qu'il s'agit de 12G€ d'économies, on constate que sur 11G€ d'amélioration du solde budgétaire prévu en 2012, 10 viennent de mesures fiscales dont plus de la moitié sont des hausses d'impôt pures et simples et ne peuvent en aucun cas être repeintes en élimination de niches fiscales.

On y trouve des mesures sur la fiscalité du patrimoine, comme la hausse du prélèvement social sur les revenus du capital ou encore de la taxation sur les résidences secondaires. Ces mesures sont accompagnées d'une taxe additionnelle pour les revenus fiscaux de référence dépassant 500k€. Il est vrai que la dernière loi de finances rectificative traitant de ces sujets remonte à des temps antédiluviens, puisqu'elle a été publiée au Journal Officiel le 29 juillet dernier et votée le 5 juillet. Un aspect important de cette loi de finances était le réforme de l'ISF, sous le paravent plus général de la réforme de la fiscalité du patrimoine. Les parlementaires ont suggéré une taxe sur les hauts revenus, certes bien différente de celle proposée par le gouvernement, mais ce dernier n'a pas voulu faire de contre-proposition. Ces mesures sur la fiscalité du patrimoine ne sont pas négligeables: à elles deux, elles devraient représenter 3.5G€. La taxation des plus-values sur les résidences secondaires représente une nouveauté: pour la première fois, on tiendra compte de l'inflation dans le décompte des plus-values. Mais cette politique va à l'encontre des mesures prises quant aux valeurs mobilières qui, elles, doivent officiellement être exonérées de plus-values en cas de détention longue à partir de 2013. L'autre disposition, l'augmentation des taxes sociales sur les revenus du capital est nettement plus classique depuis l'invention de la CSG. Le taux forfaitaire d'imposition sur les revenus du capital passe à 32.5%, alors qu'il était de 16% au début des années 90. On se rapproche de plus en plus du taux de l'IS, ce qui augure peut-être de quelques montages artistiques.

Quant à ce qui est de la politique fiscale vis-à-vis des salaires, le gouvernement augmente la CSG de façon silencieuse, en modifiant son assiette. En effet, seuls 97% du salaire brut étaient inclus dans l'assiette, ce sera désormais 98%. De fait, c'est une hausse de 1% du produit de la CSG venant des salaires, alors que le gouvernement fait profession de préserver les salaires des hausses d'impôts. Dans un registre différent, le «forfait social» est augmenté, alors que le gouvernement a fait adopter la «prime dividendes» au printemps dernier et prétend encourager la participation et l'intéressement. On peut au contraire prévoir que cette innovation de l'année 2009 va peu à peu rejoindre le niveau des cotisations sociales, entraînant sans doute une demande de suppression des obligations dans ce domaine de la part des entreprises.

Le gouvernement a fait profession d'aligner l'impôt sur les sociétés (IS) sur ce qui se pratique en Allemagne. Il a commencé par annoncer une mesure qui va peser sur la trésorerie des entreprises. On pourra sans doute attendre longtemps les mesures favorables aux entreprises. Ces mesures devraient être majoritaires: l'IS allemand rapporte deux fois moins que l'IS français (source: rapport de comparaison de la fiscalité française et allemande, p158). L'alignement des deux fiscalités relève donc de l'argument de façade. C'est au contraire une idée qui plane depuis un certain temps au vu des rapports de la Cour des Comptes (cf rapport public annuel 2011 p63).

Enfin, le gouvernement finit par ce qu'il fait quand il ne trouve rien d'autre: augmenter les droits d'accises sur le tabac et l'alcool. On peut subodorer que la TIPP suivra bientôt, les justifications sont déjà connues. Mais on voit là une nouveauté: l'état va taxer les boissons avec du sucre ajouté au profit de la sécurité sociale sous prétexte de leur participation à l'augmentation du poids des français. C'est une grande nouveauté: jusqu'ici, seuls étaient taxés des produits dont la dangerosité directe est connue, comme le tabac et l'alcool. Désormais, l'état va aussi taxer quelque chose qu'on accuse, certainement à tort, de provoquer un surpoids, d'ailleurs véritablement gênant uniquement dans des situations de fort surpoids. En d'autres termes, l'état va taxer une consommation de quelque chose qui a mauvaise presse dans l'opinion au prétexte de faire changer les comportements, alors qu'il n'y a pas de risque patent. On trouve là une des expressions du nanny state les plus éclatantes, on infantilise les citoyens et on distingue les «bons» produits des mauvais sur des critères purement moraux. C'est en fait peut-être là qu'il faut trouver l'essence de la politique fiscale de ce gouvernement: il a déjà institué le «bonus-malus» automobile comme succédané d'une taxe sur les carburants, alors même que ce n'est pas acheter une voiture de forte cylindrée qui émet des gaz à effet de serre mais bien le fait de rouler avec. Ce bonus-malus est plus une expression d'un certain jansénisme, selon lequel on est prié d'adopter des apparences modestes, peu importe qu'elles reflètent la réalité.

Au final, on s'aperçoit une nouvelle fois que ce gouvernement s'est révélé incapable de trouver de véritables économies budgétaires, celles-ci étant limitées à 1G€, soit environ 1‰ des dépenses de l'état. Celles-ci représentent pourtant plus de 56% du PIB! Au contraire, la politique adoptée semble n'être en fait que l'application du programme du PS, mâtiné de préjugés moraux. Pour combler le déficit, il n'est que de taxer tout ce qui est moralement répréhensible: les bénéfices des entreprises, les revenus du capital, les entrées dans les parcs d'attraction, les plaisirs certainement coupables que s'offre la population. De plus, la morale change vite, s'il y a à peine un an il était immoral de prendre plus de 50% des revenus de quiconque, cette époque paraît bien lointaine.