En exhumant une étude du Trésor, un article des Echos vient de forcer le parti socialiste et François Hollande à se justifier. Les justifications n'ont fait qu'embrouiller les choses, le candidat socialiste préférant rester dans l'ambiguïté le plus longtemps possible sur tous les sujets. La droite et Nicolas Sarkozy ont répondu sur le thème bien connu on menace vos avantages en se gardant bien de dire pourquoi le système actuel était bon.

Après tout, l'intérêt de faire croitre l'avantage fiscal avec les revenus n'est pas dénué de justifications. Un enfant coûte plus cher aux familles avec des revenus élevés, tant en coût d'opportunité pour les femmes qu'en coûts monétaires, les parents aisés tentant de faire plus pour leur progéniture que les parents moins riches. Si on veut les encourager à faire plus d'enfants, il n'est pas illogique de leur donner un peu plus d'argent qu'aux autres. Pour le dire encore plus directement, l'argument socialiste semble être que tous les parents se valent quelque soient leurs revenus, l'envers étant qu'on peut suggérer qu'il vaut mieux faire naître les enfants dans les familles où l'argent ne manque pas, les subsides d'état ne couvrant pas vraiment les dépenses souhaitables pour élever un enfant.

Mais ce débat masque en fait un autre point: le quotient familial est sous-tendu par l'imposition commune au sein du ménage, point que les socialistes ne veulent pas changer selon l'article des Échos. Or, sur ce point les choses sont nettement plus claires: la structure progressive de l'IRPP fait qu'il est relativement défavorable pour celui qui gagne le moins de chercher à augmenter son salaire. En effet, tout supplément de revenu est taxé au taux marginal commun. Il y a aussi dans le système actuel des bizarreries avec la PPE et la décote. Dans un système d'imposition séparée, le membre du couple qui a le plus petit salaire a un intérêt plus important à le voir augmenter, parce que son taux marginal d'imposition y serait plus faible. Les conséquences pratiques à prévoir seraient donc de favoriser le travail des femmes — puisque c'est encore elles qui ont en moyenne des salaires inférieurs —, de façon générale, d'augmenter le volume de travail en France, faisant ainsi rentrer plus d'argent dans les caisses de l'état, et façon plus mesquine, renforcer la situation de celui qui est sans doute en situation de dépendance financière au sein du couple, favorisant le départ en cas de déception ou, plus grave, de violences.

Bref, on voit mal ce qui s'oppose à ce changement particulier, mis à part le fait qu'il y a, comme d'habitude, des perdants aussi bien que des gagnants. Il est tout de même rare de trouver pour une même mesure fiscale des arguments favorables qu'on peut dire de gauche — égalité homme-femme — et d'autres de droite — augmentation du volume de travail en France. Mais, évidemment, il était fatal qu'on passe à côté.