Le quinquennat de Nicolas Sarkozy a été marquée par des atermoiements, surtout dans le domaine des dépenses publiques ou des dépenses fiscales, ces réductions d'impôts données dans des buts divers et variés. Cela s'explique en partie par la crise et l'ampleur de celle-ci. Cependant de nombreuses mesures, surtout prises en début de mandat, étaient totalement inutiles voire contreproductives.

L'exemple le plus frappant est sans doute la réduction d'impôts accordée au regard des intérêts d'emprunts immobiliers. Il s'agissait de donner un crédit d'impôt égal à 40% des intérêts de la première année et 20% les 4 suivantes. Si on prend pour hypothèse un emprunt sur 20 ans à 4%/an, cette mesure compense environ 3% des sommes remboursées à la banque. De plus, les revenus des emprunteurs augmentant faiblement à cause de la stagnation du pouvoir d'achat, il était prévisible que les banques ne tiennent pas compte de cet avantage fiscal pour calculer la capacité d'emprunt de leurs clients. On voit donc que, dès le départ, on pouvait penser que les effets de la mesure seraient limités. Ça n'empêchait pas que le coût de la mesure était de plusieurs milliards d'euros. Devant les problèmes de finances publiques, le gouvernement a décidé de supprimer cet avantage fiscal pour créer le PTZ+ en 2010, dont il a durci les conditions dès 2011.

Ce parcours est typique de ce qu'il est advenu de la loi TEPA. Seules ont survécu la réduction d'impôt au titre de l'ISF pour l'investissement dans les PME et ce qui concerne les heures supplémentaires. Si la première a sans doute eu des effets sur le financement d'entreprises — pas toujours celles qu'on attendrait — du fait de son ampleur, ce qui concerne les heures supplémentaires n'a été qu'un effet d'aubaine. Il est vrai qu'on pouvait aussi se poser la question de savoir pourquoi il fallait avantager spécifiquement les heures supplémentaires. En fait, ces mesures étaient pour la plupart des ersatz. Le bouclier fiscal remplaçait une suppression de l'ISF, la diminution de l'impôt sur les successions et la réduction sur intérêts d'emprunt devaient plus ou moins compenser les effets de la hausse des prix de l'immobilier, les heures supplémentaires le coût du travail perçu comme trop élevé. Mais aucun de ces ersatz ne pouvaient véritablement remplacer l'effet qu'on recherchait véritablement et, en plus, c'était en grande partie prévisible dès l'été 2007. Les problèmes de déficit ont obligé à plus de sagesse, mais de l'argent a été gaspillé.

Ce type de comportement s'est aussi retrouvé sur la question des retraites. En 2008, était prévu un rendez-vous pour ajuster les lois Fillon. Ç'aurait pu être l'occasion de modifier le système. Certes, à l'automne 2007, le gouvernement Sarkozy avait modifié les régimes spéciaux. Mais ces changements laissent ces régimes avec des avantages de façon durable: la durée de cotisation est par exemple toujours inférieure à celle des fonctionnaires. Et cela s'est fait au prix de concessions qui ont enlevé à ces changements une bonne part de leur intérêt financier, pour ne garder que le symbole. En 2008, le gouvernement a décidé d'augmenter le minimum vieillesse de 25%, augmentant donc les charges de retraites. Même s'il a renoncé à mener cette hausse à bien en totalité à cause de la crise, la lecture du rapport du COR montrait que les actifs pauvres étaient dans une moins bonne situation que les bénéficiaires du minimum vieillesse (p41), ce qui aurait dû porter l'attention ailleurs. L'autre fait marquant est que le gouvernement a mis progressivement fin à la dispense de recherche d'emploi, une évolution bienvenue.

La crise et la démographie ont obligé à une réforme courant 2010. La mesure la plus saillante est le recul de l'âge où on peut faire valoir ses droits à la retraite. C'est un changement bienvenu, car c'est la façon la plus efficace de faire rentrer plus de cotisation tout en contenant la hausse des pensions à verser. Combiné à la hausse prévisible de la durée de cotisation, cela permet de limiter les charges de retraites et de ne pas augmenter les cotisations — même si le gouvernement a prévu de façon incroyable de remplacer à terme une partie des cotisations chômage par des cotisations retraite. Cela permet aussi de financer l'assurance maladie, les retraités bénéficiant d'un régime de faveur, ne payant qu'une CSG allégée. Mais comme d'habitude, la réforme est basée sur des hypothèses trop optimistes et devra être revue lors du prochain quinquennat. Les régimes complémentaires sont d'ailleurs en train d'entamer sérieusement leurs réserves. Par ailleurs, ne pas l'avoir fait en 2008 a obligé à prévoir une transition plus courte.

En conclusion, certaines mesures de Sarkozy ont été clairement nuisibles, comme pour le cas des impôts sur les personnes physiques. Dans le cas des retraites, il a fini par prendre des mesures nécessaires et c'est pourquoi il mérite sur ce sujet un satisfecit. Mais il a montré une tendance à ignorer ce que le raisonnement montrait dès l'origine: la réduction d'impôts au titre des intérêts d'emprunts n'était qu'un gaspillage, augmenter le minimum vieillesse allait à l'encontre de la situation démographique et sociale de la France. On eût espéré un peu plus de rationalité dans la prise de décision.