En juillet 2008, Nicolas Sarkozy a réussi à faire passer une réforme constitutionnelle à 2 voix près. Elle portait sur de nombreux sujets de la limitation des mandats du président de la République à la procédure parlementaire.

Sacrifiant à la tradition, on y trouve de la poudre aux yeux avec des mesures qui ne mènent à rien de concret, comme l'article 75-1, selon lequel les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France. Dans le même ordre d'idées, on trouve le référendum d'initiative partagée, dont les conditions sont telles que les politiques auront déjà réagi avant qu'il ne soit organisé. Rassembler plus de 4 millions de signatures, même électroniques, en 3 mois relève de l'impossible sur des sujets qui ne sont pas passionnels et si un sujet devait susciter un tel engouement, les politiques voteront rapidement une loi qui barrera la voie au référendum. La loi organique nécessaire à son entrée en vigueur est d'ailleurs scotchée au Sénat où elle restera probablement. Cette modification de l'article 11 est donc allée rejoindre le rayon des modifications constitutionnelles attendant un certain temps leur loi organique.

Les réformes de procédure n'ont pas changé grand chose. Comme prévu, le changement de nom de l'urgence en procédure accélérée n'a en rien freiné la frénésie gouvernementale, mais juste enlevé le côté ridicule d'avoir un tiers des lois «urgentes». La discussion sur la base des textes des commissions oblige surtout le gouvernement à venir défendre sa position en séance publique, ce qui ne l'empêche pas d'y dire n'importe quoi et de compter sur des députés venus, bien chaussés, faire du remplissage loyal. De même, il est difficile de voir ce qu'a changé la modification de composition du Conseil Supérieur de la Magistrature, l'expérience montrant qu'un homme politique trouve toujours, de nos jours, le moyen de dire que la justice est éloignée du peuple.

Certaines mesures se sont avérées néfastes: la logique de la réforme était de donner plus de pouvoir aux parlementaires. La place supplémentaire accordée aux propositions de loi s'est surtout traduite par un surplus de textes idéologiques venant de la gauche et par l'apparition d'une voie détournée permettant au gouvernement de faire passer les textes qu'il avait honte ou peur de faire passer par la voie habituelle

D'autres mesures sont bienvenues, comme la limitation de l'article 16, un certain général ayant pris ses aises après le putsch des généraux en allant jusqu'au bout des 6 mois alloués. De même, la limitation à 2 mandats consécutifs, de fait, l'exercice de la fonction de président de la République est une bonne chose.

Mais la mesure principale, celle dont l'importance ne s'est pas démentie et ne se démentira pas à l'avenir est celle de la question préalable prioritaire de constitutionnalité. Il faut dire que c'est un droit attribué à chacun de faire valoir ses droits. Il est donc naturel que tous ceux qui ont une cause à faire valoir ne s'en laissent pas compter et fassent passer en revue les dispositions qu'ils jugent contestables. En termes d'efficacité, c'est sans doute la meilleure façon de procéder, il ne fait aucun doute que les requérants sont motivés et qu'ils présenteront les arguments de la meilleure façon possible. On lui doit déjà, en partie, la réforme de la garde à vue et la fin du délai d'oubli de 10 ans pour se prévaloir de l'excuse de vérité en cas de procès en diffamation.

À l'époque, il semblait surtout que la gauche s'opposait à cette réforme parce qu'il ne fallait pas laisser Nicolas Sarkozy enregistrer un succès. Les arguments utilisés allaient surtout dans ce sens. Les espoirs d'une tactique de négociation pour modifier le mode d'élection à une assemblée prétendûment éternellement à droite étaient franchement illusoires: si la révision n'était pas passée à l'été 2008, il n'y en aurait pas eu du tout, comme le montre l'exemple de la taxe carbone, remballée quand il est apparu qu'elle était impraticable. Il est clair que cette révision est à mettre au crédit de Nicolas Sarkozy, c'est même sans doute ce qu'il a fait de mieux et qui, grâce à la question préalable prioritaire de constitutionnalité, aura la plus grande postérité et les effets les plus durables.

edit: modifié l'intitulé de la QPC pour sa véritable signification.