Nicolas Sarkozy, ancien Président de la République aspirant à le redevenir, s'est apparemment fendu de déclarations clairement climato-sceptiques lors d'une réunion publique. Il a déclaré: Cela fait 4 milliards d’années que le climat change. Le Sahara est devenu un désert, ce n’est pas à cause de l’industrie. Il faut être arrogant comme l’Homme pour penser que c’est nous qui avons changé le climat…. Pour ma part, je pense que ces déclarations confirme l'opportunisme de Sarkozy en matière d'environnement, qui ne s'embarrasse pas des faits scientifiques. Ces déclarations donnent aussi à voir que le courant climato-sceptique en France est plus fort qu'il n'y paraît au premier abord, puisque Sarkozy a jugé utile de tenir des propos aussi ineptes.

L'ineptie des propos ne fait aucun doute, dans tous les domaines. Ce n'est pas parce que le climat a changé dans le passé sans l'intervention des humains que ce n'est pas le cas aujourd'hui. Il existe aujourd'hui de nombreux éléments qui montrent que le réchauffement actuel est d'abord et avant tout dû aux activités humaines — utilisation de combustibles fossiles, fabrication de ciment, déforestation, élevage de ruminants —, au point que j'y avait modestement consacré un billet. D'autre part, Sarkozy laisse entendre que l'Homme n'aurait pas le pouvoir de transformer l'environnement, ce qui est tout aussi faux. Les exemples s'étendent jusque dans l'Antiquité, où par exemple, les défrichements romains ont largement façonné les paysages de Provence. Aujourd'hui, à cause de l'ampleur mondiale des activités humaines, il n'est pas étonnant qu'elles puissent avoir des conséquences sur l'équilibre du monde entier.

Ces déclarations relèvent d'un opportunisme certain. En effet, lors de son mandat présidentiel, Nicolas Sarkozy avait commencé par lancer le «Grenelle de l'Environnement», grand barouf où il s'agissait de discuter environnement, bien sûr, mais aussi et surtout des préoccupations des associations écologistes. En mars 2010, deux ans après la fin du grand barouf, il déclarait au Salon de l'Agriculture qu'il voulait dire un mot de toutes ces questions d'environnement. Parce que là aussi, ça commence à bien faire. Entretemps, à la COP15 à Copenhague, il avait déclaré Les scientifiques nous ont dit ce qu'il fallait faire, ils nous ont dit que nous étions la dernière génération à pouvoir le faire. (...) Qui osera dire que les deux degrés d'augmentation de la température ne passent pas par la réduction de 50 % des émissions dont 80 % pour nous les pays riches, parce que nous avons une responsabilité historique ?. En passant, un des faits marquants du Grenelle de l'Environnement avait été la pantalonnade du comité de préfiguration sur les OGMs, où l'avis des scientifiques avait été proprement piétiné, ce qui avait donné lieu ensuite à diverses annulations d'arrêtés sur le MON810. En fait, le seul point commun que j'aie trouvé entre ces déclarations et ces décisions est l'opportunité politique. Au début du mandat, il s'agissait d'ouverture et de continuer dans une lignée où les écologistes avaient le vent en poupe y compris à droite; en 2010, de plaire aux agriculteurs. Aujourd'hui, Nicolas Sarkozy est en campagne pour tenter d'être encore une fois le candidat de son parti aux élections présidentielles.

Plusieurs conclusions peuvent être tirées de cet épisode. D'abord, si l'ancien Président juge opportun de faire de pareilles déclarations, c'est qu'il doit toujours exister un courant climato-sceptique dans l'opinion, même s'il ne s'exprime pas souvent publiquement. Ensuite, sur nombre de questions, cela montre que Nicolas Sarkozy a peu d'égards pour les faits démontrés. Pour quelqu'un qui professe que le premier des défis de ces cinq prochaines années est celui de la vérité, c'est assez étrange, même si de nos jours ce genre de déclaration est en fait le prélude à un déluge de n'importe quoi émotionnel. Enfin, cela montre qu'un nouveau mandat de Nicolas Sarkozy risque d'être une répétition du premier en matière de comportement.

Évidemment, Nicolas Sarkozy profite d'un contexte où la vérité en politique n'a presque plus de valeur, comme peuvent le démontrer les succès de Donald Trump, du Brexit, ou plus éloigné, du référendum sur la constitution européenne. Il ne faut pas se tromper, ces épisodes ne sont pas passés inaperçus des professionnels de la politique. Ils en ont tiré la conclusion immédiate que ça ne servait pas à rien de pointer les faits, et qu'il valait mieux surfer sur une vague émotionnelle. Mais cela devrait inciter les gens qui tiennent un peu à ce qu'il se dise de temps en temps des choses exactes dans le débat public à écarter l'ancien Président de la candidature.