Ce dimanche, Benoît Hamon a remporté la primaire socialiste. Écoutant le débat de l'entre-deux-tours, j'ai été frappé par les prémisses qui servaient à justifier les mesures emblématiques qu'il propose. En effet, elles étaient souvent fausses et apocalyptiques, quoique probablement répandues — puisqu'il l'a emporté.

Le revenu universel qu'il propose est basé sur la prémisse suivante: il y aura de moins en moins de travail à l'avenir, à cause de la robotisation ou, plus généralement de l'automatisation. C'est un point de départ fondamentalement différent de la proposition libérale du revenu universel, qui est plutôt celui de simplifier radicalement le système de protection sociale, en éliminant la plupart, si ce n'est tous, des systèmes de redistribution existant. Benoît Hamon est d'ailleurs cohérent, puisqu'il annonce aussi vouloir favoriser la baisse du temps de travail hebdomadaire, l'augmentation de l'emploi agricole à la faveur d'une baisse de la mécanisation du secteur, ou encore vouloir taxer les robots! Ce point de départ du raisonnement n'est pas très étonnant: après tout, les préretraites instituées dans les années 80 étaient basées sur une idée similaire, de même que la semaine de 35 heures lui doit beaucoup. Mais il a aussi été démontré comme faux, tant théoriquement qu'en pratique. La théorie économique prévoit surtout une baisse du temps de travail si le revenu s'élève suffisamment pour que les gens préfèrent les loisirs. Historiquement, la mécanisation n'a pas entraîné de perte d'emploi global. Personne ne dénoncerait les machines à laver comme détruisant de l'emploi, or il s'agit de l'exemple typique du robot. Elle est fausse aussi de nos jours: en fait rien ne permet de dire qu'il y aura moins de travail à l'avenir. La baisse du temps de travail hebdomadaire pour les salariés à temps plein est finie depuis les années 80. S'il existe en France un fort chômage, ce n'est pas le cas ailleurs, y compris dans des pays assez comparables comme l'Allemagne.

Un autre de ses chevaux de bataille est l'environnement et la pollution. Il dénonce dans un même souffle la pollution atmosphérique et les perturbateurs endocrinien comme les éléments parmi les plus morbides. On voit bien la convergence qu'il peut y avoir entre une partie du PS et les écologistes. Cependant, cette prémisse est fausse elle aussi. Les facteurs environnementaux sont largement minoritaires parmi les causes de cancer. Les Français n'ont jamais eu une espérance de vie aussi longue que de nos jours. Si les décomptes de morts dus à la pollution augmentent, c'est sous la pression conjuguée de la baisse des seuils et de modèles permettant de larges doubles comptages. Quant aux perturbateurs endocriniens, il suffit de se rendre compte que nombre de femmes en prennent régulièrement sous la forme de la pilule contraceptive. D'ailleurs, certains perturbateurs sont en odeur de sainteté, comme le montre le cas du resvératrol: il est dûment listé par l'ANSES comme perturbateur endocrinien tout en étant vendu comme supplément alimentaire sans soulever l'indignation de quiconque… On peut simplement rappeler que lors de la primaire des écologistes, 40% des votants ont choisi Michèle Rivasi, qui a des positions ouvertement hostile aux vaccins: on peut se demander où s'arrêtera la reprise des idées fausses et délétères des écologistes.

Bien sûr, être scandalisé par l'état perçu de la société est un moteur de l'engagement en politique. Cependant, avoir une idée correcte des problèmes sous-jacents et non pas seulement avoir des préjugés me semble important pour prendre des mesures bénéficiant au plus grand nombre. On l'aura compris, je ne voterai pas pour Benoît Hamon, car il prend comme prémisses de ses raisonnements à peu près toutes les mauvaises idées à la mode à gauche en ce moment. Je constate qu'il fera partie de la cohorte de candidats dont la vision du monde est basée sur des idées clairement fausses. Cette cohorte de candidats rassemblera sans doute plus de la moitié des suffrages en avril, malheureusement!