8 septembre 2014

Quelques éléments sur les débats immobiliers

Hier, Verel signalait la publication par le Monde daté de vendredi 5 d'une page de tribunes consacrées aux débats sur l'immobilier et le changement de direction du gouvernement en la matière. N'étant pas abonné, je n'avais accès qu'à la tribune de Cécile Duflot, ancien ministre du logement, etc. Cela n'étonnera personne que je sois en désaccord avec elle et que je trouve la défense de son bilan absolument renversante.

Une des tribunes relevait que les investisseurs institutionnels avaient fui le marché locatif des logements et une autre, écrite par un PDG du secteur du BTP, relevait l'avalanche de normes nouvelles. Ces deux points sont importants: ils expliquent une partie des affres français du logement et pourquoi certaines mesures de la loi ALUR étaient néfastes.

Le faible rendement financier de l'investissement en logements

Contrairement à Cécile Duflot, je ne pense pas que l'obsession de la rente (soit) l'ennemie de la production de logement et soit à l'origine des problèmes français du logement — en fait des grandes villes françaises. En effet, les obsédés de la rente seraient sans doute très tentés d'investir dans des logement pour en tirer encore plus de rentes si le rendement était bon. Inversement, si le rendement est franchement mauvais, il n'y a guère d'alternative que les associations philanthropiques ou les subventions. Or, tout pointe vers une dégradation des rendements locatifs depuis le début des années 2000.

Sur le site du ministère du logement, on trouve des données rassemblées par Jacques Friggit qui étudie le secteur du logement depuis longtemps déjà. On peut donc trouver parmi ces données le graphe suivant qui montre que le prix d'achat d'un logement a nettement plus augmenté que les loyers. rdt_locatif_fr.jpg En conséquence, les investisseurs institutionnels ont fui, comme on en a eu des échos anecdotiques, sous la forme de l'émoi face aux ventes à la découpe qui engendré une loi en la matière pour que les occupants du logement bénéficient de tarifs préférentiels. Cela dit, il reste des logements possédés par des investisseurs institutionnels. Pour connaître le différentiel de rendement, on peut consulter des documents de foncières cotées en bourse. Comme elles sont tenues de valoriser leur patrimoine au prix du marché, on peut connaître le rendement. Il se trouve que la place de Paris compte un exemple de foncière, dotée d'une filiale spécialisée dans les logements, fort utile. La foncière mère a publié une présentation sur ses comptes semestriels 2014 où on trouve p23 le tableau ci-dessous. rdt_cptes_FDR_2014S1.jpg Pour la filiale dont le patrimoine français est principalement concentré à Paris, j'ai pris les comptes de 2013 (p11): rdt_cptes_FDL_2013.jpg

À la vue de ces chiffres, il n'est pas bien difficile de comprendre pourquoi les institutionnels ont fui: après tout s'ils peuvent obtenir de bons rendements, ils veulent bien supporter des tracas administratifs. Ce qui veut dire en passant que le coût de ces derniers sont reportés sur les locataires. Mais s'il y a un rendement bien supérieur dans une activité connexe où le marché est moins régulé, pourquoi se fatiguer?

Cela montre aussi l'inanité de la comparaison avec l'Allemagne sur le contrôle des loyers. En Allemagne, les prix du m² semblent proches de 1000€ dans de nombreuses villes. Pas étonnant dans ces conditions qu'on puisse à la fois avoir de forts rendements locatifs et des loyers bas. Il est aussi peu surprenant que le contrôle des loyers n'y soit pas vu comme une contrainte: avec des rendements au-delà de 6%/an brut, il n'y a pas de difficultés à trouver des preneurs. À l'inverse, en France, les rendements sont déjà bas, surtout à Paris, ce qui veut dire que plafonner les loyers mène à une baisse de l'activité de construction et surtout un moindre entretien des immeubles, d'où à terme un parc de logements à louer qui se dégrade.

Enfin, l'effondrement des rendements n'est pas sans poser de questions. La première approche est de considérer que c'est une situation passagère — c'est la position de Jacques Friggit si on lit ses 200+ planches — et qu'au fur et à mesure, les prix à l'achat reviendront sur leur moyenne de long terme. L'autre approche est de considérer que la situation va perdurer — ce que je pense. Les politiques menées ont combiné restriction du foncier et empêchements divers à rallier les centre-villes. Il faudrait le vérifier, mais on a dû assister à une éviction des locataires au profit des propriétaires-résidents dans le centre de villes comme Paris.

Les normes

Étant donné la situation actuelle de prix élevés, le gouvernement a tout intérêt à ne pas augmenter les prix de construction via une inflation normative. En effet, si les prix de la construction restent contenus, cela place une limite à l'inflation des prix immobiliers dans leur ensemble. Si les prix montent trop, on aboutit à un surcroît de construction. Or, la démarche suivie depuis quelques années va en sens inverse.

Un premier exemple est celui de la réglementation thermique qui vise à limiter les consommations d'énergie pour le chauffage. Pour la RT2005, l'arrêté technique comptait 28 pages, le manuel pour calculer les performances — plus difficile à trouver — comptait 192 pages. Pour la RT 2012, il y a maintenant 2 arrêtés techniques, celui qui concerne les logements compte 42 pages. Quant au manuel, c'est un beau bébé de 1379 pages. Certes, cette évaluation «au kilo de papier» n'est pas forcément proportionnelle à l'évolution de la complexité de la norme, mais on peut tout de même supposer que si on a besoin d'un manuel 5 fois plus long, c'est qu'il y a plus de choses à mesurer, plus de choses à prendre en compte, plus de justifications à donner, etc. Bref, non seulement les performances demandées ont augmenté, mais il y a un surcroît très notable de complexité et sans doute de justifications.

Un deuxième exemple est celui de la réglementation pour l'accessibilité aux handicapés. Tous les logements neufs doivent s'y conformer. Une nouvelle fois le ministère du logement met à notre disposition un site expliquant en quoi consistent les aménagements. Pour essayer d'évaluer l'impact sur le prix à confort équivalent, regardons l'effet sur un 2-pièces. Les 2-pièces neufs ont souvent une surface d'environ 42m². La circulaire nous dit qu'il faut laisser dans les WC, en plus de l'espace habituel, 1.30x0.80m² sur le côté de la cuvette — soit un agrandissement du cabinet d'un peu plus de 1m². Dans la salle de bains, il faut laisser libre un disque de 1.5mètre de diamètre: du fait de l'aménagement habituel, il s'agit d'un carré libre de 2.25m². Dans mon appartement — un 2-pièces — ce dégagement mesure environ 1m². On voit qu'il y a sans doute une perte de surface de l'ordre de 2m² sur l'appartement, soit environ 5% de la surface. En d'autres termes, l'immobilier est renchéri de 5% pour les habitants de 2-pièces. On peut aussi quantifier cela en termes financiers: avec du neuf à un peu plus de 4000€/m², on arrive à un surcoût de 8k€ …

Ce n'est pas que ces normes soient mauvaises en elles-mêmes: c'est même plutôt l'inverse, elles partent d'une bonne intention. Cependant, le résultat est un renchérissement du prix des logements. Pour les locations, ce surcoût doit se répercuter dans les loyers, faute de quoi le marché locatif ne voit pas de nouveau logements — hors subventions. On peut espérer des gains de productivité dans le secteur du BTP, mais c'est plutôt l'inverse qui s'est produit: le coût de la construction s'est élevé ces dernières années. Comme le notait Étienne Wasmer dans une interview après avoir remis son rapport sur l'immobilier locatif, il y a sans doute un problème de concurrence. Il n'est cependant pas dit que ce problème puisse se régler rapidement.

Le constat reste cependant qu'il y a sans doute un grand nombre de normes qui sont venues s'ajouter au cours des 15 dernières années et que la tendance est à la continuation de l'inflation normative: à titre d'exemple, le prochain projet de loi sur l'énergie risque d'être un grand pourvoyeur. Dans ce domaine il faut choisir: soit des normes tatillonnes et des prix élevés, soit des normes plus simples et un espoir de baisse (relative) des prix.

Pour conclure, dans le domaine de l'immobilier comme dans d'autres, il faut choisir et les bons sentiments ne font pas de bonne politique. Si les rendements locatifs sont bas, il y aura forcément une pression à la hausse sur les loyers et à la baisse sur les frais d'entretien. Une autre alternative est l'éviction progressive des locataires au profit de propriétaires-résidents. Mettre en œuvre un contrôle des loyers en France, alors que les rendements locatifs y sont bas aurait un impact à long terme néfaste. En Allemagne, où les rendements sont élevés, le contrôle des loyers ne sert à rien: il n'y a pas vraiment de pression sur les prix! Si on veut que les prix baissent ou au moins se stabilisent en France, il faudrait construire plus dans des zones déjà densément peuplées ou alors permettre de rallier le centre plus rapidement: aucune des 2 politiques n'a été suivie. Sur les normes, elles ne sont sans doute pas responsables à elles seules des problèmes du logement en France, mais à force d'empiler des normes qui renchérissent les logements neufs, personne ne peut plus en acheter.

24 août 2014

Du bilan de Cécile Duflot

Suite aux municipales et au remaniement qui a suivi, Cécile Duflot a choisi de ne pas rester au gouvernement. À l'époque, on comprenait déjà que c'était par désaccord sur la politique à mener par Manuel Valls, ainsi que dans une certaine mesure avec la politique qui avait été menée par le gouvernement Ayrault dont elle faisait partie. Depuis, elle a écrit un livre où il ressort du titre et des «bonnes feuilles» publiées dans la presse qu'elle est déçue de la politique menée et que son passage au gouvernement a été une désillusion. Cécile Duflot défend aussi régulièrement dans les médias son action de ministre en général, la loi qu'elle a fait voter en particulier (dite ALUR).

La parution de son livre et la rentrée qui s'annonce sont l'occasion pour elle de s'exprimer de nouveau, par exemple dans une interview au Monde. Dans la réponse à la deuxième question, elle y défend son bilan personnel et la politique qu'elle comptait mener. Il s'avère cependant que ses propos ne correspondent pas à la réalité.

  1. Elle commence par louer le contrôle des loyers au prétexte que c'est un engagement de campagne. Elle oppose aussi cette mesure aux solutions d'avant: elle prétend donc que le contrôle des loyers est une idée neuve. Bien sûr, il n'en est rien: la chose est suffisamment connue pour qu'il y ait consensus parmi les économistes sur sa nocivité. C'est ainsi que Paul Krugman en a fait le sujet d'une de ses premières tribunes. Le contrôle des loyers n'est pas non plus un inconnu en France, puisqu'il a été utilisé durant l'Entre-deux-guerres. Il semble qu'avant la 2e Guerre Mondiale, on estimait le manque de logements à 2 millions d'unités et que l'état général du parc de logements était désastreux. Les résultats à attendre du contrôle des loyers sont donc nocifs, surtout pour ceux qui cherchent à se loger. Que ce serait respecter un engagement de campagne ne signifie pas pour autant que les Français ne seraient pas déçus!
  2. Pour Cécile Duflot, il fallait arrêter de doper artificiellement l'immobilier à coups de défiscalisation. Il s'avère que Cécile Duflot a donné son nom à un dispositif de défiscalisation, créé par la loi de finances initiale pour 2013, la première du gouvernement Ayrault. Ce dispositif remplace le défunt Scellier. Il est donc utile des les comparer. Pour faire rentrer plus d'argent, à la fin de la mandature précédente, le Scellier ne permettait plus que de défalquer 13% de la valeur du logement sur 9 ans et 21% sur 15 ans. Le Duflot permet, lui, de défalquer 18% sur 9 ans! Certes, les plafonds de loyers ont été abaissés. Mais il est difficile d'y voir la fin du dopage par la défiscalisation! Si vraiment elle voulait la fin des défiscalisations, elle aurait pu au moins s'arranger pour que le dispositif ne porte pas son nom.
  3. Elle finit sa réponse en affirmant que le problème du logement cher est un problème spécifiquement français. Il s'avère en fait que la situation britannique est encore pire. Le magazine britannique The Economist — que, certes, Cécile Duflot ne lit sans doute pas — publie régulièrement des articles et des infographies sur ce sujet. La cause de ces prix élevés ne fait pas de doute pour The Economist: expansion démographique associée à trop de réglementations et à un zonage qui empêche de construire. Des causes qu'on entend souvent nommées pour expliquer la situation du marché immobilier français. Sous l'égide de Cécile Duflot, la loi ALUR a été votée, on dit qu'elle détient le record de longueur sous la Ve République. On conçoit donc qu'elle ne partage pas ces conclusions.

Depuis le départ de Cécile Duflot, les déclarations gouvernementales se sont succédé pour essayer d'amoindrir l'impact de la loi ALUR. C'est ainsi que Sylvia Pinel a annoncé peu ou prou que certains pans de la loi ne seraient pas appliqués et qu'on allait réduire le nombre de documents demandés lors de l'achat d'un appartement en copropriété. Ce changement d'attitude fait suite à la matérialisation d'une baisse d'activité dans le secteur de la construction. Ce revirement, moins de 6 mois après la promulgation de la loi, ne laisse pas d'étonner: les effets néfastes de la loi ALUR étaient prévisibles et dénoncés depuis l'annonce des lignes directrices. Il montre qu'en fait, de nombreuses personnes au PS pensaient que cette loi allait avoir des effets néfastes, c'est d'ailleurs l'impression qui se dégage à la lecture de certains articles: François Hollande ne paraissait pas bien convaincu par le contrôle des loyers, par exemple. Certaines mesures prévues à l'origine, comme la garantie universelle des loyers, ont vu leur portée être amoindrie de peur des conséquences financières. Il est dommage que les éventuels opposants internes n'aient pas été plus entendus…

Ces péripéties me font penser que la campagne présidentielle n'a fait que renforcer certains illusions au sein de la gauche. Que l'idée qu'un surcroît de règlementations dans le domaine de l'immobilier, comme l'instauration d'un contrôle des loyers, puisse permettre de résoudre les problèmes de manque d'offre n'ait pas été contestée, alors que l'histoire montre le contraire, m'étonne toujours. Plus généralement, cela montre bien que bon nombre de choses promises par le candidat Hollande ne pouvaient se réaliser, parce qu'elles étaient trop irréalistes, et que si jamais certaines promesses étaient honorées, des effets néfastes apparaîtraient rapidement. Je dois aussi admettre ma surprise devant l'aplomb de la défense de Cécile Duflot: elle affirme des choses dont il est facile de vérifier qu'elle sont fausses. Sa défense de son bilan est renversante: soit elle a fait le contraire de ce qu'elle voulait — sur la défiscalisation par exemple —, soit ça n'avait aucune chance de marcher — comme le contrôle des loyers.

30 juin 2013

L'idéologie au pouvoir

Cécile Duflot, ministre du Logement, etc. donne ce dimanche une interview à la Provence, titrée Trop d'excès dans l'immobilier suite à la publication de son projet de loi, modestement qualifié d'historique par le site du gouvernement. Cette interview est un concentré d'idéologie, ce qui présage mal des résultats à venir.

Mme le minsitre remarque dès l'abord que, en 10 ans, les loyers ont augmenté de 40% dans les zones les plus tendues. Selon elle, c'est donc dans les zones où il y a relativement le moins de logements disponibles par rapport à la demande que les prix ont le plus augmenté. En d'autres termes, elle constate une pénurie dans certaines villes; en fait, principalement à Paris et dans sa banlieue. La solution proposée est le contrôle des prix, puisque les propriétaires qui dépasseraient le montant maximum devront ramener le prix du loyer au niveau fixé par le préfet: l'administration fixera autoritairement un niveau maximal de prix. Or, ce dernier est plutôt associé à des pénuries, parfois sur les produits les plus mondains. Dans le secteur du logement, les conséquences d'une règlementation tatillonne sont connues: de grandes difficultés pour les candidats à la location pour trouver un logement, des conditions non monétaires confinant au délire. Cela permet aux économistes de publier des articles récurrents ou de se faire la main au début d'une carrière d'éditorialiste. Toujours est-il qu'en France, il est sans doute plus facile d'emprunter 200k€ sur 20 ans que de louer un appartement à 750€/mois. On peut simplement constater que tenter de résoudre une pénurie par le contrôle des prix est sans doute une première.

Mais ce n'est pas tout! En effet, une possibilité sera offerte aux propriétaire de louer plus cher que le plafond s'ils justifient de caractéristiques particulières du logement. Mais attention: À tout moment, la commission de conciliation ou le juge pourront ordonner un retour au maximum légal fixé par le préfet. En d'autres termes, on renforce la crainte des propriétaires de se faire avoir par leur locataire qui pourra demander à faire baisser son loyer à tout moment.

Cécile Duflot enchaîne ensuite par sa proposition d'une garantie universelle des loyers. Cette nouveauté a déjà fait l'objet d'un billet d'Alexandre Delaigue, dont il ressort que ce n'est sans doute pas une bonne idée. En effet, on verrait sans doute les impayés augmenter … et la facture retomberait sur les locataires et propriétaires qui n'essaient pas de profiter du système. À terme, le poids de l'assurance incomberait d'ailleurs surtout aux locataires, par un effet proche de l'incidence fiscale: les propriétaires intègreront ce nouveau coût au prix demandé et l'offre de logement a une borne supérieure à court terme, ce qui ralentit la concurrence, comme le montre la hausse des loyer en zone tendue. Comme visiblement les assureurs privés sont réticents à assumer un risque qu'ils jugent incontrôlable, c'est l'état qui va prendre le risque à sa charge via un nouvel établissement public.

On arrive alors aux mesures que veut prendre le ministre pour augmenter l'offre via la construction de logements. La première batterie de mesures consiste en l'installation de nouvelles niches fiscales, dont on croyait pourtant qu'il fallait les faire disparaître. C'est ainsi que la TVA sera abaissée pour certains types de constructions où l'accès serait accordé sous conditions de ressources. Il faut tout de même rappeler que presque les 2/3 de la population est éligible au HLM, avec ce nouveau type de logement, la quasi-totalité de la population devrait être éligible à une réduction de prix. Mme Duflot fait aussi la publicité de la niche fiscale qui porte son nom, dont elle dit qu'il est distribué par les promoteurs immobiliers dans l'esprit qui a contribué à sa création : construire des logements là où on en a besoin, à des niveaux de loyers inférieurs au marché, comme sans doute ses prédécesseurs le Scellier, le Robien, etc. Cela dit, il faut reconnaître que construire n'importe où a fini par régler le problème de la hausse continue des loyers dans certaines villes.

On en arrive à un autre problème provoqué par la règlementation foisonnante: les recours contre les permis de construire. Cécile Duflot se propose de pourchasser ceux qui transigeraient avec les promoteurs parce que certains seraient des professionnels des recours voire des mafieux qui devront verser des dommages et intérêts si leur recours est jugé abusif. Cependant, les associations de défense de l'environnement seront préservées de ce type de poursuite. Après cette reconnaissance que ces associations sont des professionnels des recours, on peut donc prévoir une soudaine hausse du dépôts de statuts en préfecture. On peut aussi remarquer l'instauration d'une nouvelle catégorie de justiciers autorisés, comme ceux qui défendent la nature sauvage en harcelant les sauveteurs de pinsons. Toujours est-il que transiger pour de l'argent apparaît comme néfaste par rapport au fait de camper sur ses positions pour empêcher la construction d'immeubles. Or, c'est plutôt à cette deuxième espèce qu'appartiennent ceux qui intentent des recours, quitte à laisser à l'abandon de vieux entrepôts et des maisons insalubres et décrépites, plutôt que d'accepter l'installation de logements neufs dans leur quartier. Mais procéder ainsi aurait sans doute obligé à couper les ailes aux recours venant des associations écologistes envers tout ce qu'elles détestent, des antennes relais aux projets d'infrastructure.

Au fond, on voit là que c'est l'idéologie qui semble guider Mme le ministre; le monde se partage entre bons et méchants: propriétaires responsables encouragés contre marchands de sommeil pourchassés, infâme recours mafieux contre juste action d'une association écologiste, marché livré à lui-même excessif contre état bienveillant et raisonnable, ignoble logement insalubre contre roulotte et yourtes pimpantes. Comme bien d'autres lois sur le logement, celle-ci n'atteindra certainement pas ses buts, tellement elle va dans la mauvaise direction: renforcer encore et toujours la règlementation. On pourrait bien sûr essayer l'inverse, mais il s'agit là d'un prêche dans le désert, comme le montre la date de cette dernière tribune: 2005.