C'est à la suite, fort à propos, d'un tweet qu'on découvre une affaire d'importance rapportée par Sud-Ouest et la République des Pyrénées. Un prévenu se voyait menacé de 6 mois de prison et 9000€ d'amende — sanction que le législateur a, depuis, dans sa grande sagesse, porté à 1 an de prison et 15000€. L'objet du délit était d'avoir recueilli des espèces d'oiseaux en grand danger en France, à savoir deux merles blessés et deux œufs de pinsons qu'il a fait couver. Il avait gardé ces volatiles dans ses volières, où des pandores les avaient découverts. Car le prévenu n'était pas n'importe qui: il anime un club d’ornithologie et remporté divers prix pour son élevage de rossignols du Japon, il devait sans doute être connu dans la région pour sa passion des oiseaux. Relaxé en première instance, il était convoqué en appel, l'administration, conformément à la tradition, ne laisse pas courir impunément de tels individus. À l'action publique s'est jointe l'action civile de la Ligue de protection des oiseaux qui réclame 1500€ de dommages et intérêts à l'impudent.

Ce qu'on reproche à l'amoureux des oiseaux, ce n'est pas d'avoir maltraité des animaux ou mis en danger des espèces menacées. Au contraire, ce qu'on lui reproche, c'est d'avoir empiété sur un monopole d'état. En France, il est en effet interdit de détenir sans autorisation expresse de l'état des animaux reconnus comme sauvages, c'est-à-dire ne figurant pas sur la liste limitative des animaux domestiques et encore faut-il que ces derniers ne trouvent pas leur origine dans la nature «sauvage» comme dans le cas des pinsons. L'atavisme administratif conduit donc l'état à poursuivre sans relâche tous les contrevenants à la règle qu'il a lui même édictée, la justifiant de manière circulaire.

Le cas des demandes de ligue de protection des oiseaux est tout aussi intéressant. Rien ne l'empêchait de rester l'arme au pied, surtout que la section locale lui avait dans le passé confié des oiseaux. On peut encore constater que la tactique des écologistes a encore porté ses fruits: petit à petit se construit un cadre légal et moral où les associations de la «société civile» sont reconnues comme les seuls défenseurs de la nature sauvage, sans égards aux conséquences sur les êtres humains. Leur idéologie les conduit à séparer les comportements en deux catégories, où le bien se distingue facilement du mal. Sont bons des actes qui se rapprochent d'un passé mythique, l'agriculture biologique, l'électricité éolienne et solaire, la coexistence séparée avec les animaux sauvages, avec de bons samaritains seuls autorisés à réparer les empiètements du vulgaire. Pour répandre une telle idéologie, il faut bien disposer d'une chaire qui vous donne le pouvoir de promulguer des édits moraux.

C'est donc ainsi qu'avec le concours de l'état s'est construit un monopole sur la bonté et la bienfaisance, qu'il faut bien désormais défendre chèrement. En faisant payer 1500€ deux merles et deux pinsons vivants, la LPO évalue ainsi ces animaux au prix de l'or, ce qui est incompréhensible si on n'y intègre pas la valeur de ce monopole sur la bonté. Il faut bien ça pour chasser les gêneurs les plus ennuyeux, ces manants qui croient pourvoir bien faire par eux-mêmes.