Décongélation
Par proteos le 25 janvier 2014, 00:15 - Politique - Lien permanent
Il y a un an à peu près, une proposition de loi écologiste était renvoyée en commission. Elle a fait cette semaine son retour dans l'hémicycle et elle a cette fois été adoptée. Même si le contenu, après décongélation, a été notablement altéré par rapport à la version précédente, on ne peut que constater la victoire des écologistes et des associations anti-antennes qui ont là fait un premier pas, selon une tactique bien rodée.
Il n'est pas nécessaire d'aller bien loin pour voir cette tactique détaillée: il s'agit de mettre un pied dans la porte
en accréditant l'idée que les ondes émises à des fins de communications sont dangereuses, d'interdire la publicité auprès des jeunes de gadgets électroniques, d'augmenter la paperasserie demandée afin de provoquer un choc de simplification de pouvoir attaquer les permis de construire, de publiciser les choses pour pouvoir faire le siège des mairies. À ce propos, j'ai pu constater que le projet, près de chez moi, de construction d'une antenne relais à la place d'une maison à l'abandon suscite une opposition très localisée — avec, à certains moments, les 3 numéros en amont et en aval aux couleurs de Robin des Toits — et la maire s'est fendue d'un message dans le journal de la commune pour dire qu'elle s'opposait à ce projet. Alors même qu'en certains points de mon immeuble, on ne capte pas de signal — ce qui peut-être aussi dû aux caractéristiques du bétonnage local. J'ai aussi remarqué que sur mon lieu de travail, situé à quelques kilomètres, la 3G n'était disponible qu'en des endroits très particuliers. Bien sûr, ces demandes de renforcement des procédures par les associations anti-antennes ne feront qu'augmenter, prenant prétexte de la préoccupation des citoyens, elle-même alimentée en partie par l'inscription à l'agenda de débats pareils. Cette tactique est bien connue, l'obstination dont ont fait preuve les élus écologistes en fait partie.
Une autre partie de l'offensive est médiatique. Une fois de plus, force est de constater que, face à des activistes très motivés, le consensus scientifique et son langage pusillanime ne font pas le poids. Ainsi cet article du Figaro, peu suspect de sympathie pour les thèses écologistes, où à chaque énoncé de la position orthodoxe, la position hétérodoxe a droit à un exposé bien plus long, mais vide de faits autres qu'anecdotiques. Ce même journal nous gratifie aussi du récit au premier degré et sans aucune critique d'une malade. L'article du Monde nous rappelle la monographie du CIRC mettant les champs radio-fréquences en classe 2B. Mais bien sûr pas un mot sur les autres membres de cette classe, comme des substances aussi strictement régulées que le café, les extraits de gingko biloba et d'aloé vera, ou les légumes conservés dans du vinaigre. Et bien sûr pas un mot de l'évaluation du pire cas possible: même en tirant le maximum de ce qu'on pouvait dire d'une seule étude sur le sujet, les antennes n'étaient pas dangereuses, mais j'avais pu calculer qu'une utilisation très intensive du téléphone pouvait à l'extrême provoquer 60 cancers par an en France. Une lecture cursive le montre rapidement: dans la presse, la possibilité d'une absence de danger n'est mentionnée qu'en passant ou en faire-valoir de l'opinion contraire, alors même que c'est le consensus scientifique sur la question.
Disons le simplement: les radio-fréquences ne sont pas un danger réel. En bientôt 100 ans d'usage de la radio, aucune maladie professionnelle n'a été signalée. L'usage massif du portable depuis plus de 10 ans aurait dû donner lieu à une explosion de maladies en cas de danger important. Au contraire, les innovations que les radio-fréquences ont permises ont sauvé des vies en grand nombre. Elles rendent aussi de grands services à la population et c'est la raison pour laquelle cette technologie a été aussi rapidement adoptée. Plutôt que de parler d'activité économique, c'est là le fait marquant du téléphone portable: un objet utile à la population et qui ne pose pas de problème de danger en lui-même. Et que voit-on? La presse fait maintenant campagne contre un objet de tous les jours et les députés votent une loi contre cette technologie dont l'utilité ne se dément pas. Ce qui amène au fond la question: le téléphone portable, voire même la télévision, la radio, le radar, tout cela serait-il autorisé s'ils étaient inventés demain? Plus largement, si une nouveauté fort utile pour la population en général apparaissait demain, les politiques n'auraient-ils d'autre empressement que de l'interdire?
Commentaires
"Plus largement, si une nouveauté fort utile pour la population en général apparaissait demain, les politiques n'auraient-ils d'autre empressement que de l'interdire?" -> début de réponse avec le débat sur la cigarette électronique, je crois...
GM,
je vais avoir du mal à vous donner tort sur la question de la cigarette électronique. Au fond, c'est ce qui est inquiétant: on a du mal à trouver une innovation utile à un grand nombre de personnes qui ne rencontre une certaine hostilité et des projets de réglementation pour limiter sa diffusion. Alors même que nombre de politiques et d'intervenants dans les média n'ont que la mot ''innovation'' à la bouche!
Proteos, ne pensez-vous pas qu'il est important de légaliser totalement la e-cigarette lorsque l'on sait que la cigarette traditionnel fait plus de 70 000 morts par an en France ?
Je trouve que le débat sur la cigarette électronique est un faux débat...
Plusieurs villes ont déjà décidés d'interdire l'utilisation de la e-cigarette au même titre que le tabac ...
cigarette electronique ego,
tout d'abord, une remarque: comme vous pouvez le constater, ce blog ne comporte aucune publicité … J'espère que vous comprendrez que je n'apprécie pas particulièrement qu'on lie vers un site commerçant dans mes commentaires, même si je comprends bien que c'est votre site à vous.
Mais pour en venir au fond:
- la cigarette électronique est légale en France, ne subit pas de taxe spécifique, n'a pas de réseau de distribution forcé. Il y a certes des restrictions sur la publicité etc, mais quand on y pense, il n'y a pas énormément de produits qui ne font pas face à une régulation. Comme la cigarette électronique est un produit proche d'un autre nettement plus nocif, je pense qu'une certaine prudence est de mise: la légalisation totale me semble donc de mise en France tant que la loi reste en l'état.
- Je pense qu'effectivement la cigarette électronique est 1 à 2 ordres de grandeurs moins nocive que la cigarette au vrai tabac.
- Mais je pense aussi que ce n'est pas une raison pour revenir sur l'interdiction de fumer dans certains lieux, typiquement sur un lieu de travail.
Certains termes du débat peuvent sembler farfelus — comme l'invocation du geste etc — mais il ne faut pas oublier que les attitudes ont changé et que c'est une mauvaise manière que de fumer dans un lieu clos autre que votre domicile, ce que ç'aurait toujours dû être.Personne n'irait brûler des papiers ou autre chez quelqu'un d'autre. Vous imaginez la scène?
Au cours d'une soirée entre copains :
- Je peux brûler des papiers et des plastiques?
- Oui, mais ouvre la fenêtre.
C'est impensable, surréaliste. Personne n'oserait demander une telle chose. Mais si on remplace par "brûler une cigarette", ça devient pensable.
Bizarre.
simple-touriste,
Ça semble acceptable à certains. Mais je constate que même chez les fumeurs, c'est devenu rare qu'ils ne comprennent pas qu'il est de bon ton de fumer dehors, au moins au boulot!