28 novembre 2015

Qu'attendre de la conférence de Paris sur le climat?

La conférence de Paris sur le climat va bientôt s'ouvrir, et on peut se demander ce qui pourra bien en sortir. Dans le précédent billet, j'ai expliqué pourquoi l'objectif officiel des 2°C est intenable: pour le dire simplement, les émissions de CO₂ sont aujourd'hui trop élevées pour que le «reste à émettre» ne soit pas dépassé. Mais cela ne veut pas dire que rien ne peut être fait pour amoindrir les effets du réchauffement climatique. Je suis tout de même très circonspect sur les possibilités d'un changement rapide de tendance: il me semble que les combustibles fossiles seront encore longtemps la principale source d'énergie.

Les engagements d'émissions resteront volontaires

Le paramètre majeur de la lutte du changement climatique est la quantité de gaz à effet de serre qui seront émis au cours des décennies qui viennent. Plus les quantités émises, cumulées sur les décennies, seront importantes, plus l'élévation de température sera grande et plus la probabilité d'évènements catastrophiques augmentera. Dans le meilleur des mondes, les émissions mondiales maximales de gaz à effet de serre seraient l'objet des négociations: le lien étant direct avec l'élévation de température, on pourrait savoir où le curseur de la solution s'est arrêté. Dans le monde réel, la voie praticable est basée sur des engagements seulement volontaires de la part de l'ensemble des pays du monde, limités à l'horizon 2025 ou 2030. C'est un constat qui s'impose après un aperçu rapide de l'histoire des négociations climatiques.

Les USA n'ont jamais ratifié le protocole de Kyoto. D'une part, cela s'inscrit dans une attitude rétive du Congrès américain envers tous les traités contraignants au niveau mondial. Par exemple, les USA n'ont pas ratifié la Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer. Ça ne les empêche d'appliquer la dite convention et d'en être de fait les principaux garants, grâce à leur marine, la plus puissante au monde et qui est la seule à être présente partout dans le monde. D'autre part, les Républicains tiennent un langage climatosceptique ou ne comptent pas le réchauffement climatique parmi leurs priorités. En conséquence, ils s'opposent à tout traité contraignant sur les émissions et bloquent de ce fait toute ratification.

Les pays qui ont connu — ou connaissent — une forte croissance économique sont aussi opposés à des limitations imposées de l'extérieur, les voyant comme une entrave à leur développement économique. L'augmentation de leurs émissions n'est pas pour rien dans la difficulté à trouver un accord: en 1997, année de la signature du protocole de Kyoto, la Chine émettait 3Gt de CO₂ via la combustion des combustibles fossiles soit 14% du total mondial, en 2013, c'est passé à 9Gt soit 28% du total mondial (source AIE CO₂ Highlights 2015). Pendant ce temps-là les émissions mondiales sont passées de 22Gt à 32Gt; la totalité de la hausse des émissions sur la période est imputable aux pays hors OCDE.

De toute façon, les pays qui ne respectent pas leurs engagements ne font face à aucune sanction: le Canada s'est ainsi retiré du protocole de Kyoto juste avant que la période contraignante ne commence. Il faut dire que la cible était une baisse de 7% par rapport à 1990, on constate aujourd'hui une hausse de 28%… Beaucoup de pays n'ayant aucun espoir d'atteindre leur cible ont aussi refusé de prolonger pour la période supplémentaire jusqu'en 2020, comme le Japon. On peut donc considérer que l'aspect «contraignant» d'un traité est finalement faible, ce qui rend le désaccord entre Fabius et Kerry d'importance très relative.

La logique d'accord sur une cible mondiale contraignante a naturellement échoué à Copenhague par le rassemblement de toute ces causes. Les engagements ressemblent à des paris publics, les pays qui veulent réellement les tenir peuvent se retrouver les dindons de la farce. Les pays pauvres, qui émettaient déjà plus que les pays riches, ne voulaient pas de contraintes, de même que les États-Unis. Rien qu'avec la Chine et les États-Unis, on trouve là 44% des émissions mondiales: un accord sans ces 2 pays n'a pas grand sens. Les négociations se sont donc rabattues sur ce qui était encore praticable: les engagements volontaires des différents pays.

Les engagements proclamés par les différents pays sont en fait déjà connus, il est inutile d'espérer qu'aucun pays les révise pendant la conférence … et d'ailleurs des révisions importantes ne seraient pas très sérieuses. Une bonne partie des pays inscrits à l'ONU a déposé une contribution, à la suite de l'accord entre les USA et la Chine l'an dernier. Contrairement à la publicité positive du moment, il était déjà clair à l'époque que les pays s'engageaient à faire ce qu'ils avaient déjà décidé de faire, chacun de leur côté, c'est-à-dire pas grand chose d'autre que la prolongation des politiques actuelles. Un bilan de l'ensemble des engagements a été fait par l'UNFCCC, il en ressort principalement les 2 graphes suivants. indcs_2015_consequences.jpg indc_2015_emissions.jpg C'est le défaut de ces engagement non-contraignants: comme il n'y a personne vue comme un arbitre honnête ni ayant le pouvoir de faire respecter les engagements, la logique de la tragédie des communs joue à plein. Il n'y a pas vraiment de dynamique pour préserver le climat, ni de confiance réciproque, et ce d'autant qu'il n'y a pas de confiance, ni dans la tenue des engagements, ni dans la qualité de la vérification.

Les paramètres techniques

Un des problèmes qui se pose pour qu'un accord soit crédible est la capacité à vérifier son application. En effet, un moyen de respecter les engagements est de ne pas tout compter. Des erreurs dans le décompte des émissions masque aussi la réalité de la situation et donc trompe sur ce qui est possible et les conséquences des éventuels engagements pris. Or il s'avère que dans les pays en développement, la comptabilité des émissions n'est pas fiable: la Chine a ainsi annoncé réévaluer à la hausse sa consommation de charbon de 17% pour les années précédentes. Comme la Chine est le premier émetteur mondial et que la combustion du charbon représente plus de 80% de ses émissions, on voit que ce n'est pas une question mineure. Le problème est évidemment que mieux contrôler demande des moyens et risque de faire paraître certains pays sous un jour peu favorable. Les pays en développement, qui sont a priori les plus concernés par une sous-évaluation des émissions, y sont a priori peu favorables. Cependant, il me semble qu'il y a des chances d'amélioration sur ces points très techniques.

Ce qui a peu de chances de se réaliser sur ce point est plutôt un comptage plus sain des émissions dues à la «biomasse», essentiellement sur le bois. Les politiques favorisant la production d'énergie renouvelable sont des politiques qui encouragent l'utilisation du bois. À petite échelle, l'utilisation du bois est sans doute neutre sur le plan des émissions de CO₂. À grande échelle, c'est nettement plus douteux: cela implique de couper des arbres et donc un fort risque de contribuer à la déforestation. Cette dernière n'est pas incluse dans les statistiques énergétiques et donc pas incluse dans les classements généralement publiés. De plus, le pays qui brûle le bois n'ajoute rien à ses propres émissions: elles sont en fait ajoutées à celui d'où provient le bois. On voit qu'il y a une différence significative avec les combustibles fossiles où c'est toujours le consommateur qui se voit imputer les émissions. Le minimum serait d'exiger que les pays qui brûlent du bois importé justifient des plantations effectuées, via leurs propres actions, dans les pays exportateurs.

L'argent

Une des promesses faites aux pays pauvres est de les aider à hauteur de 100 milliards de dollars US par an. Un fonds a été créé pour recevoir les dons, principalement des états. Actuellement, les contributions atteignent royalement 10 milliards de dollars. Évidemment, cela ne veut pas dire que l'objectif ne sera pas atteint. En effet, il faut comprendre qu'il ne s'agit pas là uniquement de dons: l'aide au développement française inscrite en lois de finances est de l'ordre de 3G€, faire un don de 1G€ par est donc une réorientation importante de la politique d'aide aux pays pauvres. Le comptage effectué par l'OCDE pointe vers aussi vers les prêts bilatéraux, les prêts des banques de développement ainsi que vers les aides à l'export. En comptant tout ça, on arrive déjà à environ 60G$. Les banques de développement ayant promis de faire plus dernièrement, on devrait arriver au chiffre symbolique.

Pour conclure, inutile d'attendre ce qui serait un accord de long terme sur la question climatique à Paris. Cela supposerait de s'accorder sur une masse d'émissions pour le reste du 21ᵉ siècle ou alors sur un prix du carbone mondial, une méthode pour s'assurer de l'application des dispositions du traité. Cet objectif est totalement hors d'atteinte puisque les états sont logiquement jaloux de leur souveraineté. Il n'y aura donc pas de contrainte, ni réelle, ni écrite sur le papier en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre. Par contre, il y a maintenant un grand nombre d'engagements nationaux et sans doute, au moins sur le papier, un mécanisme ne permettant que des objectifs plus ambitieux par pays pour les négociations qui suivront celles de Paris. Le freinage progressif des émissions peut potentiellement s'engager à partir de là. De l'autre côté, on peut espérer qu'il y aura sans doute quelques ajustements bienvenus sur la comptabilité, ce qui permet de dégager la voie pour des accords réellement plus contraignants. Les problèmes financiers sont plus ou moins résolus, ce qui devrait permettre aux pays les plus pauvres de signer.

12 novembre 2015

L'intenable objectif des 2°C

L'objectif officiel des négociations en cours sur le climat est de limiter le réchauffement climatique à moins de 2°C par rapport à l'époque pré-industrielle (cf par exemple les conclusions de la Conférence de Cancun en 2010). J'ai déjà exprimé ma conviction par deux fois que cet objectif était intenable. Cette année, on va y revenir, diverses voix de connaisseurs du domaine se sont clairement exprimées sur le sujet en disant en substance que les scénarios du GIEC qui annonçait réussir la quadrature du cercle ne faisaient que servir la soupe aux politiques pour leur permettre d'afficher une réussite de façade.

Mais d'abord, commençons par voir ce qui est nécessaire pour limiter le réchauffement à 2°C. Le GIEC se base pour cela sur divers modèles économétriques où les émissions de CO₂ sont une donnée de sortie qu'on met dans un modèle du climat. Un certain nombre de ces modélisations ont eu lieu, et le GIEC a établi des sortes de scénarios moyens qui donnent une idée générale de ce qu'il faut faire pour les respecter. Ils sont désignés sous le titre de Representative Concentration Pathways suivi du forçage radiatif (une mesure de l'effet de serre additionnel). 4 scénarios moyens sont donc pris par le GIEC: les RCP2.6, RCP4.5, RCP6 et RCP8.5. Le scénario RCP2.6 est celui correspond à l'objectif officiel de la limitation du réchauffement à moins de 2°C. AR5_syr_scenarios_synthese.jpg AR5_CO2_budgets.jpg

Comme expliqué dans le tableau ci-dessus, le scénario qui permet de limiter le réchauffement à 2°C implique que les émissions de CO₂ soient limitée à 1000Gt. Comme proposé dans cet éditorial originellement publié dans Nature Geoscience, on peut alors se livrer à un petit calcul:

  1. La déforestation représente 4 ou 5 Gt/an. Si on considère qu'elle va s'arrêter en 2050 avec une baisse linéaire, on obtient entre 80 et 100Gt
  2. La production de ciment et plus précisément la calcination du calcaire est le principal procédé émetteur de CO₂ non compté dans les statistiques énergétiques. En comptant qu'aujourd'hui, elles représentent entre 1.5 et 2Gt/an, on peut compter que d'ici 2100 environ 100Gt seront émises (l'éditorial parle de 150Gt).
  3. Depuis 2010, 5 ans ou presque se sont écoulés, et on peut penser que la situation en 2020 sera surtout la poursuite des tendances actuelles. Actuellement, la combustion des combustibles fossiles pour la production d'énergie émet grosso modo 32Gt/an. En 10 ans, on atteint 320Gt.
  4. Si on suppose qu'après 2020, il y a une baisse linéaire des émissions, pour ne pas dépasser les 480Gt qui restent, il faut que les émissions venant de la production d'énergie s'arrêtent en 30 ans, soit en 2050.

Comme l'hypothèse d'une baisse franche dès 2020 et l'élimination en 30 ans des industries des combustibles fossiles sont des hypothèses héroïques, on peut déjà se dire qu'atteindre l'objectif officiel va être très compliqué.

Mais ce n'est pas tout: le scénario RCP2.6 ne compte pas vraiment atteindre le zéro émission des combustibles fossiles en 2050. Par contre, des émissions négatives sont prévues à partir de 2070, que ce soit dans la production d'énergie ou dans l'extension des forêts. RCP_ff_AR5.jpg emissions_450ppm_AR5.jpg Pour cela, la plupart des modèles font appel au BECCS pour BioEnergy, Carbon Capture & Storage, en clair, on brûlerait du bois, activité supposée neutre en carbone et on capturerait le CO₂ produit grâce aux technologies de capture et séquestration du carbone. Sachant qu'il est douteux qu'à grande échelle, brûler du bois soit vraiment neutre en carbone et qu'il n'existe qu'une poignée d'usines pratiquant la capture et la séquestration du CO₂ de par le monde, cela paraît tout de même sacrément optimiste! Un autre petit détail: utiliser autant de biomasse nécessiterait d'y consacrer de l'ordre de 5 millions de km² de terres arables, soit un peu plus de la moitié de la superficie des USA… C'est pourquoi on peut affirmer que 2°C, c'est faisable … mais uniquement dans les modèles!

Ces modèles qui permettent d'atteindre l'objectif officiel ont tout de même un défaut: ils permettent de créer un écran de fumée devant la situation réelle des choses. En effet, écrire un scénario où on peut se permettre d'extraire massivement du CO₂ de l'atmosphère permet d'émettre plus au total, avant que la capture ne commence à faire son effet. Cela permet de conserver le discours politique sur les négociations: il faut toujours agir maintenant si on veut «sauver la planète», ce "maintenant" se déplaçant au gré des sommets sur le climat et des rapports du GIEC. Il est en quelque sorte toujours 5 minutes avant minuit. Pour illustrer le problème, en 2010, le programme des Nations Unies pour l'environnement a publié un document sur les efforts à faire pour combler entre les politiques menées ou annoncées et ce qu'il faudrait faire pour atteindre l'objectif des 2°C: l'objectif des émissions à l'horizon 2020 était de 44Gt d'équivalent CO₂ pour l'ensemble des gaz à effet de serre. En 2015, le résumé pour les décideurs de la nouvelle édition mentionne 42Gt pour … 2030! En 5 ans, on a gagné 10 ans d'émissions «gratuites»: c'est fort!

C'est pourquoi des voix se sont élevées pour dire qu'il fallait que les scientifiques cessent de tenir ces scénarios pour crédibles et de les maintenir en avant. Il faut remarquer que c'est déjà le cas pour l'objectif de limiter le réchauffement à 1.5°C: les scénarios n'étaient déjà pas très nombreux en 2010, ils ont disparu aujourd'hui. On pourrait certes penser qu'abandonner l'objectif plus ou moins présent depuis les années 90 dans les négociations risquerait d'en couper l'élan: si tout est perdu, à quoi bon? Mais en fait, les conséquences du réchauffement climatiques empirent progressivement avec son amplitude et signaler que l'objectif originel ne peut plus être atteint serait surtout un signe que la situation est hors de contrôle et que la détérioration est déjà bien engagée. Si on continue à apporter des bonnes nouvelles aux responsables politiques, ils sont en quelque sorte protégés des conséquences de la procrastination puisqu'ils peuvent toujours prétendre que l'objectif sera atteint pendant que les négociations piétinent.

Des échos clairs de la situation sont parus en langue anglaise, et dernièrement dans la presse en français. Mais à la fin de la COP21, il ne faudra pas se laisser abuser: si les engagements ne permettent pas de tenir l'objectif des 2°C ce n'est pas par manque de volonté politique aujourd'hui, mais parce que l'objectif est devenu inatteignable.

11 novembre 2015

Le réchauffement climatique

À l'occasion de la prochaine conférence sur le climat qui va se tenir à Paris, la COP21 selon son acronyme anglais, je vais écrire quelques billets pour en couvrir quelques aspects. Ce premier billet est consacré à la base scientifique du phénomène et des prévisions que font les modèles sur le futur du climat. Rien de novateur a priori, il s'agit surtout de fixer les idées en partant du dernier rapport du 1er groupe de travail du GIEC.

On peut définir le réchauffement climatique de façon générale par l'accumulation de chaleur par la Terre sur une longue durée. Cela se traduit par une hausse des températures moyennes à la surface du globe, de façon non uniforme: la répartition du stock de chaleur peut changer entre la surface des océans et les continents, par exemple. Mais cette accumulation peut se mesurer depuis l'espace: en effet, le seul moyen pour la Terre d'évacuer de la chaleur est de la rayonner et le principal apport — et de très loin — est la lumière du Soleil. Comme depuis les années 70, des satellites mesurent ces 2 données en permanence, il est désormais établi avec certitude que la Terre accumule de la chaleur. Cet apport est évalué à environ 0.45W/m² — en répartissant uniformément à la surface de la Terre — en moyenne entre 1971 et 2010 (p7 du résumé technique). En conséquence de quoi, les températures moyennes ont augmenté avec une tendance d'environ +0.12°C par décennie depuis les années 50 (p5) et sur les 10 années les plus chaudes jamais mesurées, 9 sont au 21ᵉ siècle et la manquante est 1998, année la plus chaude du 20ᵉ siècle.

Une fois les observations acquises, il reste à les expliquer. Comme la luminance du Soleil n'a pas beaucoup varié ces dernières décennies, il faut se tourner vers d'autres explications, et il s'avère que c'est bien l'accumulation de gaz à effet de serre qui expliquent le mieux les observations. RFs_AR5.jpg Il faut dire que l'effet de serre a une longue histoire tant théorique que pratique. Dès la fin du 19ᵉ siècle, on s'est aperçu que la température moyenne à la surface de la Terre était trop élevée par rapport à un bête calcul d'équilibre thermique. Il fallait donc expliquer la différence: rapidement, on s'est aperçu que divers gaz absorbaient dans l'infrarouge, comme la vapeur d'eau ou le gaz carbonique. D'où des tentatives de déterminer la variation de température moyenne si on augmentait la concentration de l'atmosphère en CO₂. Au fond, le modèle de l'effet de serre est assez simple à comprendre: en absorbant une partie du rayonnement émis par la surface de la Terre, l'atmosphère agit comme une couverture qui fait monter la température. Une partie de la chaleur est piégée et ce d'autant plus qu'une partie de l'énergie absorbée revient aussi à la surface de la Terre par des phénomènes de conduction thermique. Comme les bandes d'absorption du CO₂ ne sont pas confondues avec celles de l'eau, augmenter sa concentration provoque plus d'absorption et donc une hausse de la température.

Quant à l'origine de l'augmentation de CO₂, il n'y a aucun doute sur sa réalité et sur son origine. Cela vient de l'utilisation de combustibles fossiles, de la déforestation ainsi que de quelques procédés industriels. Le GIEC parle d'émissions depuis 1750, mais en fait, avant la Seconde Guerre Mondiale, les émissions étaient bien moins élevées. Ce n'est qu'avec l'exploitation massive du pétrole que les émissions ont véritablement décollé. fossil_fuels_AR5WG1.jpg Au total en 2010, les émissions de CO₂ dues aux activité industrielles (combustion de combustibles fossiles plus divers procédés) dépassent les 30 milliards de tonnes (Gt) par an, auxquelles il faut ajouter 5Gt/an pour la déforestation et l'équivalent d'un peu moins de 15Gt/an pour les autres gaz à effet de serre comme le méthane et le N₂O, pour un total d'à peu près 50Gt/an d'équivalent CO₂.

Ensuite, le GIEC détermine des scénarios moyens et lie des masses d'émissions à une probabilité de rester sous une certaine élévation de température. Il est important de noter que ces quantités sont données à partir de 2011: nous sommes en 2015 et ces budgets sont déjà entamés. AR5_CO2_budgets.jpg Pour accomplir l'objectif proclamé d'avoir plus de 2 chances sur 3 de limiter le réchauffement à moins de 2°C, il restait donc à peu près 1000 Gt de CO₂ possibles à émettre (les autres gaz à effet de serre ne sont pas comptés dans ce budget, mais modélisés à part).

Le premier effet du réchauffement climatique est la hausse du niveau des mers par 2 voies: la dilatation thermique et la fonte des glaciers terrestres. Ces 2 termes expliquent environ 80% de la hausse observée du niveau des mers; le reste est dû à la différence entre le pompage des nappes phréatiques et du stockage dans des barrages. La précision des observations de la hausse du niveau des mers s'est grandement améliorée à partir des années 90 quand le premier des satellites d'altimétrie radar a été lancé. Avec ses successeurs, on observe depuis plus de 20 ans une hausse d'environ 3mm/an du niveau moyen des mers. Au 21ᵉ siècle, la différence entre les situations où il y aurait un fort réchauffement et celui où il serait plus limité est relativement faible: si on limite le réchauffement à 2°C, on peut s'attendre à une hausse du niveau des mers de 40cm contre 75cm dans le cas de la prolongation tendancielle (grosso modo +4 ou +5°C). Mais une vraie différence apparaît à plus long terme: la fonte de la calotte du Groenland se produit vers un réchauffement de +1.5°C et une hausse du niveau des mers de 6m à l'échelle de plusieurs millénaires, et à l'échelle de plusieurs siècles, le cas du fort réchauffement conduit à une élévation de l'ordre de 4 à 5m en moyenne, contre moins d'un mètre s'il est contenu. Combiné aux autres changements annoncés dans la répartition des précipitations, de la hausse de la fréquence des épisodes de fortes précipitations, on comprend qu'il y a là motif à agir, ne serait-ce que pour limiter la vitesse des changements les plus néfastes.